Carte n° 63100: Emploi des temps et des modes après un verbe de la volonté au présent

Généralités

Les cartes n° 63100 et 63200 documentent l’emploi des temps et des modes après un verbe de la volonté employé au présent et au passé. Elles sont complémentaires aux cartes n° 62110 à 62610 qui se concentrent sur la morphologie des formes du subjonctif. Contrairement à ces cartes morphologiques qui utilisent indistinctement des énoncés avec le verbe principal au présent ou au passé, nous distinguons ici le verbe de la principale au présent (carte n° 63100) et au passé (carte n° 63200), ce qui permet d’étudier aussi le fonctionnement de la concordance des temps. Pour plus de détails à ce sujet, cf. aussi la carte de synthèse n° 63300 qui présente pour chaque informateur son emploi des temps et des modes dans les huit énoncés du questionnaire destinés au départ à documenter la morphologie du subjonctif.

Corpus

La carte n° 63100 a été établie sur la base de l’énoncé «Mon père veut que je me lève à six heures» du questionnaire commun aux deux sexes. Le choix d’un autre verbe dans la subordonnée («… que je me réveille, … que je sorte», etc.) est sans conséquence pour la question étudiée ici. De même, l’emploi du conditionnel présent «il voudrait que …» dans la principale ne modifie pas la syntaxe de la subordonnée. En revanche, nous avons exclu les reformulations qui utilisent une complétive à l’infinitif («il veut me faire lever…, il nous fait toujours lever …»). Malgré quelques lacunes, l’énoncé voulu a été recueilli au moins une fois dans chaque point d’enquête.

Relevés antérieurs

La question de syntaxe abordée ici n’a pas été étudiée par les enquêtes géolinguistiques antérieures à la nôtre (ALF, TP).

Cartographie, analyse

Du point de vue de leur fonction, les icônes  et  représentent des formes du subjonctif présent, mais distinguent leur origine étymologique:  < présent du subjonctif étymologique de la 1^re conjugaison;  < plus-que-parfait du subjonctif latin. 

1. Comme l’a déjà montré la carte n° 62110, seuls les parlers du Chablais (Vouvry, Troistorrents, Val-d’Illiez) utilisent des formes caractérisées par un morphème [j] et qui correspondent à un présent du subjonctif étymologique de la 1^re conjugaison.

2. Tous les autres parlers de notre réseau d’enquêtes possèdent des formes en [s] ou [ʃ] qui, étymologiquement, remontent à un plus-que-parfait du subjonctif latin, mais qui se sont pleinement substituées aux anciennes formes du présent du subjonctif. Malgré leur origine, elles expriment donc le présent du subjonctif. Dans une majorité des parlers, l’opposition entre le présent et le passé du subjonctif n’est cependant pas neutralisée et se réalise par d’autres moyens (cf. carte n° 63200).

3. À Bionaz et à Sixt, nos informateurs ont produit une forme qui, formellement, correspond à un passé composé du subjonctif «que je sois levé». Nous considérons cependant qu’avec une principale au présent, ces formes sont plutôt à comprendre comme l’expression d’un accompli du présent (‘que je sois debout’).

4. Dans plusieurs parlers (Chamoson, Conthey, Lens, Troistorrents, Val-d’Illiez) nous avons recueilli des réponses à l’indicatif à côté des formes du subjonctif. Le même phénomène se trouve pour un plus grand nombre de parlers sur d’autres cartes qui étudient la morphologie du subjonctif (carte n° 62210 pour la 2^e personne du singulier: Chamoson, Conthey, Fully, Isérables, Miège, St-Jean, Val-d’Illiez; carte n° 62310 pour la 3^e personne du singulier: Chalais, Chamoson, Conthey, Lens, Lourtier, Miège, St-Jean, Val-d’Illiez), le plus souvent en alternance avec les formes du subjonctif dans les mêmes parlers. Nous pensons que ces formes indiquent que nos parlers ont gardé une certaine liberté de choisir le mode subjonctif ou indicatif après un verbe exprimant la volonté, selon le degré d’insistance sur le désir de réalisation du souhait.