Carte n° 41230: Verbes en -āre à radical palatalisant (conjugaison 1B): l’infinitif de «bailler» ‘donner’

Généralités

Les cartes n° 41110 à 41230 documentent la morphologie de l’infinitif des verbes de la 1^re conjugaison (< lat. -āre) selon la bipartition de ces verbes qui est caractéristique pour le francoprovençal:

– les cartes n° 41110 («aller») et 41120 («vêler») pour des verbes sans radical à effet palatalisant (conjugaison 1A),

– les cartes n° 41210, 41211 et 41212 («manger»), 41220, 41221 et 41222 (irrigāre, molliāre ‘arroser’) et 41230 (bajulāre ‘donner’) pour les verbes dont le radical exerce une influence palatalisante (conjugaison 1B).

En particulier, les cartes examinent d’éventuelles influences analogiques du type 1A sur le type 1B et inversement.

Corpus

Le verbe «bailler» ‘donner’ a fait l’objet de l’énoncé «La chienne a soif. Il faut lui donner à boire» du questionnaire féminin. 21 sur 24 informatrices ont produit l’énoncé dialectal correspondant en utilisant l’infinitif attendu. L’informatrice de St-Jean a utilisé le verbe [dnˈɑ] (pour la concurrence de «bailler» et «donner» en Suisse romande, cf. GPSR 5: 865a, où les parlers du Val d’Anniviers sont considérés comme une zone de résistance à l’avancée du type «bailler»); l’informatrice de Liddes a fourni une réponse alternative («aller porter»). 11 attestations supplémentaires proviennent de l’énoncé «Dans le bouillon, pour donner du goût, on peut mettre un os à moëlle».

Dans les réponses du corpus masculin, des attestations plus ponctuelles proviennent de l’emploi météorologique de «bailler» dans le sens de ‘pleuvoir’ (cf. GPSR 2: 199): «Quand le ciel est noir, on sait qu’il va pleuvoir», et de quelques réponses spontanées.

À l’exception de Vouvry, tous les parlers sont documentés.

Relevés antérieurs

L’infinitif «bailler» ‘donner’ n’a pas été relevé par les enquêtes géolinguistiques antérieures à la nôtre (ALF, TP).

Cartographie, analyse

– Dans 23 parlers sur 25, on trouve les désinences étymologiques en [i, ɪ] ou [e, ɛ], attendues en francoprovençal pour un verbe de la conjugaison 1B, apparemment sans répartition géolinguistique significative. Les formes en [i, ɪ] sont nettement plus répandues que sur la carte analogue pour «manger» (n° 41211); dans plusieurs parlers, les formes en [i, ɪ] et [e, ɛ] coexistent. La plupart des parlers conservent le [ʎ] issu de lat. bajulāre ou réduisent celui-ci à [j]; un [l] dépalatalisé ne se trouve qu’à Arbaz et chez l’informateur de Savièse.

– Une désinence analogique en [ɑ] correspondant aux formes de la conjugaison 1A n’est attestée que pour Arbaz, en alternance avec des désinences étymologiques en [] et [e].

– Des formes en [ø] ou [œ] qui ne peuvent être attribuées avec certitude ni à la conjugaison régulière 1B ni a la conjugaison analogique 1A (cf. le commentaire de la carte n° 41211) ne se trouvent qu’à Chamoson et à Nendaz, en alternance avec des formes régulières en [ɪ] ou [].