Carte n° 51450: Verbes irréguliers: «avoir», 1^re personne pluriel de l’indicatif présent

Corpus

La forme «nous avons» a été relevée au moyen d’un énoncé du questionnaire masculin qui contient deux occurrences de la forme voulue: «Même si nous avons une cuisinière (électrique), nous avons gardé le potager (à bois)». À cela s’ajoutent de nombreuses attestations spontanées (281 occurrences en tout). D’un point de vue géolinguistique, celles-ci sont pourtant réparties de façon très inégale: comme pour les autres formes verbales de la 1^re personne du pluriel, elles sont rares dans les parlers du Chablais qui tendent à remplacer «nous» par «on» (2 attestations à Vouvry et à Val-d’Illiez, respectivement); elles manquent complètement dans nos matériaux pour Sixt et La Chapelle-d’Abondance.

Dans les parlers du Valais central et oriental, en revanche, le polymorphisme qui caractérise les formes est bien attesté. Le nombre d’occurrences est cependant trop bas pour permettre de dégager de manière fiable des formes «dominantes» dans les parlers individuels.

Relevés antérieurs

La 1^re personne pluriel de l’indicatif présent d’«avoir» fait l’objet des cartes n° 91 «nous avons (pris une purge)» et 522 ««nous avons été (riches et heureux)» de l’ALF. Les données de la carte n° 522 sont pourtant inutilisables ici, une partie des parlers valaisans ayant remplacé «nous avons été» par «nous sommes eu» (cf. carte n° 42311). La forme manque dans les TP.

Nous reprenons ici l’extrait de la carte ALF n° 91 qui a déjà servi pour notre carte n° 34020 «Le clitique sujet prévocalique de la 1^re personne du pluriel». Celle-ci documente l’emploi de «on» pour «nous» pour le point savoyard 957; il ne s’agit donc pas d’un phénomène récent. En revanche, elle ignore complètement le riche polymorphisme qui caractérise nos données. La présence très fréquente d’un appendice nasal (cf. notre tableau des formes) n’est attestée que pour un seul point valaisan (pt. 989) et les parlers valdôtains; les nombreuses formes diphtonguées manquent presque complètement.

ALF, carte n° n° 91 «nous avons (pris une purge)»

Cartographie, analyse

La carte n° 51450 distingue les désinences attestées par les mêmes symboles que toutes les autres cartes consacrées à la morphologie de la 1^re personne du pluriel (cartes n° 51420 à 51490).

• Des formes bisyllabiques avec maintien du [v] ou [ʋ] intervocalique ([n aʋˈ, n ɐvˈɛm], etc. ne sont attestées qu’à Fully, Isérables et Lens, toujours en concurrence avec des formes monosyllabiques, contractées, qui ne conservent que la voyelle de la désinence ou une voyelle qui résulte de la coalescence entre la voyelle [a] du radical et celle de la désinence.

• D’autres formes bisyllabiques qui maintiennent le timbre [a] de la voyelle initiale du radical, mais sans [v], se trouvent à Chalais et à Nendaz, également en concurrence avec des formes monosyllabiques.

• Quant au vocalisme des formes monosyllabiques, dans presque tous les parlers, les formes recueillies sont caractérisées par une voyelle antérieure ([, ẽ, , ]), antérieure arrondie ([, ] ou une diphtongue correspondante ([e, ɛ], etc.). Les voyelles les plus fermées apparaissent dans les parlers orientaux (Lens, Montana, St-Jean); les voyelles les plus ouvertes [] sont présentes – toujours en concurrence avec les voyelles à aperture moyenne, [, ], etc. – dans dix parlers sur 25, dans toutes les régions de l’espace valaisan.

• L’informatrice d’Arbaz présente des formes avec un [l] initial agglutiné d’origine analogique, comme dans d’autres formes du paradigme d’«avoir» (cf. cartes n° 51180, 51330, 51332, 51680, 52360, 52620, 61320). Ces formes manquent chez l’informateur masculin, alors que celui-ci utilise également des formes à [l] initial agglutiné pour la 1^re personne pluriel de l’imparfait (carte n° 52360). Pour une discussion plus détaillée de cette agglutination, cf. le commentaire de la carte n° 33060.