Dans nos matériaux, le déterminant possessif est attesté dans la grande majorité des parlers. Il ne manque qu’à Savièse, Isérables et Nendaz. Dans l’ensemble du domaine, la forme féminine est du type [nˈutra, nˈɔtra] (< lat. nostra), avec quelques variantes dues aux différentes évolutions phonétiques du groupe -str- ([nˈuθra, nˈuɦra], etc.). Les formes masculines sont plus diversifiées. En partie, elles remontent à un nominatif latin noster (> [nˈuθrə], etc.); d’autres reflètent l’accusatif nostrum (> [nˈutrɔ], etc.). Malheureusement, pour plusieurs parlers, nos matériaux ne documentent que la forme féminine et ne permettent pas de déterminer si les formes masculines correspondantes remontent à noster ou à nostrum. Nous avons donc renoncé à distinguer les deux types par deux symboles différents (toutes les formes recueillies sont indiquées dans le tableau des formes observées).

Vouvry, Troistorrents et les deux points d’enquête savoyards présentent les formes attendues du déterminant possessif du type [nˈutr], formé à partir de nostro par analogie sur mon, ton, son, selon l’explication proposée par Hasselrot 1938/1966. Val-d’Illiez, en revanche, qui se trouve dans la même zone, a produit une forme sans nasalisation. Dans la chaîne parlée, l’emplacement de l’accent tonique est instable ([nˈytr / nytrˈ] à Sixt); le possessif peut aussi être complètement inaccentué.

Une deuxième forme nasalisée du type [nˈntrɔ] se trouve dans un petit groupe de parlers du Valais central (Conthey, Liddes et Lourtier). Ces formes résultent d’une simple évolution phonétique (nasalisation progressive, provoquée par le n- initial), selon Bjerrome 1957: 57. Dans nos matériaux, cette nasalisation est cependant facultative à Lourtier. Nous n’avons pas pu observer la forme analogue enregistrée par les TP à Nendaz, où le déterminant possessif est devenu rare (cf. Praz 1995: 628); Praz lui-même (loc. cit.) n’indique plus qu’une forme sans nasalisation noûtro.

Le possessif zéro semble moins fréquent que pour d’autres personnes grammaticales; nous ne l’avons pas enregistré dans 6 points d’enquête sur 25.

L’adjectif possessif est présent dans la zone habituelle de la rive gauche du Rhône, entre le Val d’Hérens et Bagnes. Le pronom possessif qui apparaît chez les informateurs de Fully et de Troistorrents est formellement identique à l’adjectif possessif.

Comme pour les formes de la première personne du singulier, le substitut du possessif (à + pronom personnel) est bien présent dans les parlers de la rive droite du Rhône, ainsi qu’à Hérémence. À la différence de ce qui a été observé pour la 3^e personne du singulier, certaines occurrences de ce type ne portent aucun accent d’insistance (cf. en particulier les enregistrements des énoncés suivants, recueillis à Fully et à Hérémence):

[a mˈiʁ ɡʀã ɑ n l adzətˈɑvə ʒamˈ d ʒ ɑjiˈ - i le faʒˈaə mˈɪmwœ] (FullyF)
La mère-grand à nous elle achetait jamais de z-habits .. elle les faisait même.

[l paʀ lə maːʀ a nɔ atsətˈɑᶹ pa d tsambˈɛt] (HérémenceF)
Le père la mère à nous achetaient pas de jambon.

Il se pourrait donc que la fonction de cette tournure ne soit pas identique pour toutes les personnes grammaticales: en partie du moins, elle est devenu un possessif «ordinaire», sans insistance particulière. Par ailleurs, on notera que [a nɔ] neutralise l’opposition entre le singulier et pluriel de l’objet possédé («le père à nous» ‘notre père’ /v/ «les parents à nous» ‘nos parents’).

Comme c’est presque toujours le cas, Bionaz utilise la tournure de + pronom personnel. À cela s’ajoute, à titre exceptionnel, une attestation à Hérémence.

Aux Marécottes, nous avons relevé trois occurrences d’une tournure substitutive vers + pronom personnel ([lʏ pˈaʁɛ vɛʁ nøʊ] ‘notre père’ (deux fois), [la mɛːʒˈ ʋɛʀ nˈ] ‘notre maison’) qui n’apparaît pas ailleurs.