Carte n° 61310: morphologie du conditionnel: «il faudrait», la désinence de la 3^e personne singulier (3sg)

Corpus

La 3sg du conditionnel «il faudrait» a été utilisée dans quatre énoncés du questionnaire pour susciter les formes du subjonctif dans la subordonnée (cf. les cartes n° 62110, 62120, 62310 et 62520): «Il faudrait que Madeleine se lève à sept heures moins le quart» (questionnaire commun, 46 réponses utilisables pour la morphologie du conditionnel), «Il faudrait que je mange avant midi» (questionnaire commun, 41 réponses utilisables), «Il faudrait que je te voie aujourd’hui» (questionnaire féminin, 20 réponses utilisables) et «Mon gendre, c’est quelqu’un! Il faudrait que vous le voyiez» (questionnaire féminin, 18 réponses utilisables). À cela s’ajoutent 28 attestations spontanées ou résultant de reformulations: 153 attestations en tout. Tous les parlers sont attestés.

Relevés antérieurs

La 3sg du conditionnel de «falloir» fait l’objet de la carte n° 537 de l’ALF. Les TP col. 158 «il faudra» notent «Les sujets répondent souvent par le conditionnel», mais sans préciser quelles sont les formes concrètes concernées.

Cartographie, analyse

La carte n° 61310 confirme la similarité entre les désinences de la 2sg (carte n° 61220) et la 3sg du conditionnel.

– Les désinences en ‑[re], -[rɛ] et/ou leurs variantes en -[rø], -[rœ], -[rə], sont présentes dans 18 parlers sur 25, seules dans 9 parlers, en concurrence avec ‑[ri] dans six cas, avec ‑[ra], ‑[raɛ] dans trois cas. Une comparaison avec la carte n° 61320 fait apparaître une concurrence avec ‑[ri] dans trois parlers supplémentaires (Arbaz, Nendaz et Val-d’Illiez). Le polymorphisme concerne donc près de la moitié des parlers étudiés. Toutes les formes en ‑[re], ‑[rɛ] et ‑[rø], ‑[rœ], ‑[rə] coïncident en outre avec les désinences homophones de la 3sg du futur (carte n° 53310), ce qui peut expliquer l’embarras des auteurs des TP relaté ci-dessus.

– Les formes en -[ri] apparaissent seules dans 7 parlers (parlers épiscopaux de la région de Sierre: Lens, Montana, Miège, Chalais, St-Jean, ainsi que Savièse et Les Marécottes); elles sont en concurrence avec les formes en ‑[re], -[rɛ] dans 6 cas, 9 en comptant également les occurrences de la carte n° 61320.

– Les formes plus spécifiques en ‑[ra], ‑[raɛ] ne sont attestées que dans trois parlers (Fully, Chamoson et Lourtier), toujours en concurrence avec des formes en ‑[re].

– Les trois parlers situés au nord de Sierre (Lens, Miège, Montana) conservent (facultativement) le -[t] morphologique de la 3sg du conditionnel. Contrairement aux données de l’ALF, nous n’avons enregistré ce [t] ni en Haute-Savoie ni en Vallée d’Aoste.

– Le [k] final d’Evolène ([fudrˈek]; [k] dit «parasite» ou «diphtongue durcie»; cf. le commentaire de la carte n° 41310, note 1) reflète une ancienne diphtongue [eɪ] .

– Comme dans la morphologie du futur, le -[r]- étymologique des formes du conditionnel peut s’amuïr dans certains parlers. Le phénomène est plus fréquent ici que sur d’autres cartes; il apparaît – toujours facultativement – dans sept parlers.