Morphologie de l’imparfait

1.

La carte n° 52330 confirme la vitalité du type héréditaire autochtone en -r- [er, ɪr], etc. (< lat. erat) dans l’ensemble des parlers valaisans. La voyelle tonique du radical se réalise en général dans une zone de voyelles antérieures [i - ʏ - e - ɛ]; parfois, elle est diphtonguée ([ˈɛɪr] à Conthey). Dans certains parlers, les formes en [er, ɛr] et [ir], etc. coexistent et semblent interchangeables (cf. p.ex. l’énoncé suivant de l’informateur de Liddes); nous représentons toutes les formes correspondantes par le même symbole.

a bẽ li ɥɛɪdzˈ l ˈɪr - l ˈɪrëː pɔ sɛ dʒilˈe -  bɛæ py n ɐv ɐsʏbˈẽ li ɥˈedzə mï li ɥˈedzə l ɪr pɔ travajˈe - l ˈɪrə pɔ mənˈe lə fømˈ ᶞæ li tsã d əvˈɛ - li ɥˈdz y bˈẽ - y bẽ pɔr alˈi kirˈi də se a la dzuː yː - s də s pɛjˈ kwˈə də tsɑtˈ kã l er pwœ - pwɪ liz plejˈ asʏbˈẽ pwe dezarpˈe deri mtˈaɲɛ lɪ d ala - l apɛlˈa lɪ ɥɛɪdzˈœtɛ mɛ ɪrɛ le de ɥˈɛɪdzəː -
Ah ben, les petites luges c’était .. c’était pour se luger* .. eh bien puis on avait aussi les luges mais les luges c’était pour travailler .. c’était pour mener le fumier dans les champs d’hiver .. les luges ou bien .. ou bien pour aller chercher de [se] (?) à la forêt ou .. elles s’employaient aussi l’été quand c’était pour euh .. puis ils les employaient aussi bien pour désalper des alpages là d’aller .. ils (les) appelaient les lugettes, mais c’était là de luges ..
*[dʒilˈe] ‘glisser, luger’ (cf. GPSR 5/2: 1026 s.v. dyilâ).

Dans plusieurs parlers (Chamoson, Troistorrents, Val-d’Illiez), la voyelle tonique du radical s’est ouverte à [a] ou [ɑ]. À Val-d’Illiez, les formes en [a/ɑ] coexistent avec celles en [i, e]; à Chamoson et Troistorrents, elles sont seules attestées.

2.

Dans une grande zone qui va de l’Est valaisan et de la Vallée d’Aoste jusqu’au Chablais – nettement plus grande que celle indiquée in GPSR 6: 904a –, on observe l’existence d’un radical alternatif en [i/ɪ], plus rarement [], sans [r]. Dans nos matériaux, celui-ci coexiste partout avec la forme pleine en -[r]-, à l’exception de Bionaz, où il est seul attesté.

3.

 À Chalais et à St-Jean, le type [ɪr/er] coexiste avec une forme analogique [ʃir], qui a agglutiné un [ʃ] initial provenant d’autres formes du paradigme d’«être» (cf. [ʃi] ‘je suis’, [ʃ] ‘nous sommes’, [ʃ] ‘ils/elles sont’).

4.

Des formes en -t- correspondant au type français «était» n’apparaissent qu’à Vouvry, à la Chapelle-d’Abondance et à Sixt. À Vouvry et à La Chapelle-d’Abondance, les formes en [t] restent cependant clairement marginales par rapport aux formes héréditaires en [ʁ]; à La Chapelle-d’Abondance, elle fait même l’objet d’une auto-correction spontanée:

j ɑʋˈe dɔʊ dø paʁtˈiː j ɑʋˈɛ ləː - ð l bɑɕˈe j ɑʋɛ - j ɑvˈe -  l bɑɕˈe etɛ sepaʁˈe - eʁə sepaʁˈo
Il y avait deux deux parties il y avait le .. dans le bassin il y avait .. il y avait .. le bassin était séparé .. était séparé.

5.

Torgnon prend une place à part avec ses formes en [iv] formées de manière analogique (cf. Hubschmied 1914: 12-13 et 94). Une forme en [i] est marginale.

Morphèmes de la 3^e personne du singulier

6.

Les désinences de la 3^e personne du singulier ([e, , ɛ, ø, œ, ə], etc. ou zéro ne présentent aucune particularité par rapport à d’autres verbes ou d’autres temps verbaux.