Carte n° 51535: Verbes irréguliers: «aller», 2^e personne pluriel (2pl) de l’indicatif présent

Corpus

La carte n° 51535 utilise les données provenant des énoncés «Vous allez chez le médecin» et «Si vous allez à la montagne, il faut que vous vous leviez avant qu’il fasse jour» du questionnaire commun, et «Qu’est-ce que vous allez manger ce soir?» du questionnaire féminin. Grâce à cette redondance, tous les parlers sont attestés, en général avec plusieurs occurrences – et avec leur polymorphisme.

Relevés antérieurs

La 2pl d’«aller» est documentée à l’impératif par la carte ALF n° 31 «allez (ensemble, vous trois)»; elle manque dans les TP. Les formes mentionnées pour l’espace valaisan dans les variantes phonétiques de l’article aller du GPSR 1: 283s. sont très lacunaires.

Cartographie, analyse

Observations concernant le radical

• Comme à la 1pl (carte n° 51460), nos données permettent d’observer une certaine concurrence entre les bases *alare et vadĕre dans les parlers valaisans, avec la présence de formes du type [vˈaɐdə] à Savièse et Chamoson, en concurrence avec *alāre chez l’informatrice de Chamoson, mais seules attestées à Savièse. Ces formes qui n’ont pas été relevées par l’enquête de l’ALF manquent aussi dans l’article correspondant du GPSR.

• Comme le montre aussi la forme  du point 978 Nendaz de l’ALF, le [l] intervocalique de la base *alāre (ou plus précisément, ici, de la 2pl *alātis, avec le premier [a] représentant la radical et le deuxième la désinence) tend à s’amuïr dans plusieurs parlers du Valais central. Dans nos matériaux, ce phénomène s’observe à Arbaz, Conthey, Isérables et Nendaz ainsi que, ponctuellement, à Val-d’Illiez. À Conthey, Isérables et Nendaz, la forme bisyllabique [aˈɑ] peut ensuite se monophtonguer; dans la forme amalgamée [a] ou [ɑ] qui en résulte, il n’est plus possible de distinguer le radical et la désinence.

Observations concernant la désinence

• Certains parlers francoprovençaux conservent une trace de la désinence latine ‑tis (‑ātis, ‑ētis, ‑ĭtis, ‑ītis, selon les différentes conjugaisons latines), alors que sinon, le -t- intervocalique latin s’amuït dans l’évolution phonétique régulière du francoprovençal. Il en résulte des formes «longues» en ‑[d]- de la 2^e personne du pluriel: p.ex. [ɑlˈɑdə] (Bionaz), [ɐlˈʊːdɛ] (Torgnon) à côté des formes «brèves» sans ‑[d]- telles que [alˈa] (Orsières). Dans nos données, le maintien du ‑[d]- est particulièrement fréquent dans les deux parlers valdôtains (cf. aussi la forme ld du point 975 de l’ALF). Il est plus sporadique dans les parlers valaisans où les formes correspondantes semblent latentes; leur emploi est généralement imprévisible. Pour «allez» elles apparaissent cependant à Fully ([ɑlˈɑdœː]) et dans les deux formes appartenant au paradigme de vadĕre: [vˈaɐdə] à Chamoson, [vˈɐdə], etc. à Savièse (< lat. vāditis).

• Contrairement à l’ALF qui présente de manière uniforme des désinences en ‑ pour tous les parlers valaisans (des formes vélarisées en ‑ ou ‑ n’apparaissent qu’en Haute-Savoie), nos propres matériaux attestent aussi des formes en -[ɔ] ou ‑[o] à Arbaz et à Liddes. Des vélarisations comparables du ‑a latin tonique de la désinence se trouvent aussi pour l’infinitif (cf. carte n° 41110). Quant au parler valdôtain de Torgnon, il utilise souvent des formes en [u] ou [ʊ] pour le participe passé en lat. ‑ātu (cartes n° 42110, 42140) et pour la 2^e personne du pluriel en ‑ātis (carte n° 51514) des verbes à radical non palatalisant.

• Comme pour d’autres verbes (cf. carte n° 51510), le parler d’Évolène est seul à conserver (facultativement) le ‑[s] final morphologique de la désinence latine ‑ātis.