Carte n° 51165: Verbes irréguliers: «prendre», 1re personne singulier de l’indicatif présent. (1) Les formes de la base verbale
⇒ Pour les généralités s’appliquant à toutes les cartes consacrées à la morphologie de la 1re personne singulier de l’indicatif présent (n° 51110 à 51190), voir la fin du commentaire.
Corpus
La carte a été établie sur la base de tous les énoncés du corpus qui contiennent la forme «je prends», 42 occurrences en tout. Les réponses les plus systématiques proviennent de trois phrases, «Comme neuf heures, je prends …» et «Je goûte à quatre heures» du questionnaire commun aux deux sexes, et «Pour monter sur le toit, je prends une échelle» du questionnaire masculin. De nombreuses reformulations limitent le nombre d’attestations disponibles; celles-ci manquent pour Les Marécottes, Sixt et les deux parlers valdôtains.
Cartographie
La carte n° 51165 superpose deux informations concernant la morphologie du radical:
la nature de la voyelle: [], [];
la nature de la consonne finale: [z], [ʒ], [n] ou absence.
Pour ne pas surcharger la carte, la question des marques morphologiques qui peuvent s’ajouter au radical (clitique sujet, désinence vocalique ou tous les deux) est traitée à part, à la carte 51166.
Analyse
Consonantisme: Tous les parlers valaisans possèdent une forme en [z] ([pʁˈzɔ], etc.) ou [ʒ] ([prˈʒɔ], etc.) d’origine analogique, calquée sans doute sur le modèle de facio > [fˈzɔ, fˈɛʒɔ] (cf. la carte n° 51160). Les formes sans consonne finale analogique [pr, pʁɛn] sont rares: elles n’apparaissent qu’à Lourtier, Val-d’Illiez et Vouvry ainsi que, avec une métathèse [pɛʁn], à La Chapelle-d’Abondance.
Vocalisme: Dans tous les parlers documentés, la voyelle du radical reflète l’évolution phonétique régulière, en francoprovençal, du e latin suivi de nasale > [ɛn, ] () avec, parfois, une centralisation en []. Une seule forme en [] () chez l’informatrice de Nendaz pourrait être influencée dans son vocalisme par le français, tout en gardant par ailleurs sa morphologie en [ʒ].
NB. Pour l’emploi des désinences et des clitiques sujets, voir la carte n° 51166.
Généralités concernant toutes les formes verbales à la 1re personne singulier de l’indicatif présent (cartes n° 51110 à 51190)
Dans les descriptions «classiques» du francoprovençal (cf. p.ex. Martin 1990: 682), la morphologie verbale est décrite comme étant caractérisée par la conservation de la désinence -o de la 1re conjugaison latine à la 1re personne singulier de l'indicatif présent (lat. canto > fp. [tsˈtɔ]), étendue ensuite à toutes les conjugaisons et à d’autres temps verbaux. La 1re personne se distinguerait ainsi des 2e et 3e personnes du singulier selon le schéma «1re pers. ≠ 2e pers. = 3e pers.». Pour un verbe irrégulier tel que «venir», la conjugaison «canonique» serait donc du type 1sg [vˈəɲɔ] ≠ 2sg [v] = 3sg [v] ‘je viens ≠ tu viens = il vient’. La forme caractéristique du verbe à la 1re personne pourrait ainsi contribuer à expliquer la nature facultative du clitique sujet correspondant dans un grand nombre de parlers valaisans (cf. Marzys 1964: 22 et nos cartes n° 31021 et 31031). Dans nos matériaux, cette question est abordée pour le paradigme du verbe «voir» aux trois premières personnes du singulier (cartes n° 51190, 51220, 51320) ainsi que pour le paradigme du subjonctif présent (cartes n° 62110, 62210 et 62310).
Dans les parlers de notre réseau d’enquêtes, la situation réelle est cependant bien plus complexe, raison pour laquelle nous l’étudions ici pour huit verbes à la 1re personne du singulier: trois verbes issus de la 1re conjugaison latine en -are (cartes n° 51110, 51120, 51130), un verbe de la 4e conjugaison latine en -īre (cartes n° 51140 et 51141) et huit verbes irréguliers (cartes n° 51150 à 51190). Nous y abordons d’une part la nature de la désinence qui n’est pas toujours [ɔ] (ou une voyelle vélaire proche de [ɔ]: [ʊ, , o, , ]). Relativement souvent, elle se centralise ou se palatalise en [ʏ, ø, œ, ə], voire même en [e, ɛ] ou s’amuït complètement. D’autre part, nous y examinons une éventuelle corrélation entre la nature de la désinence, la forme morphologiquement marquée ou non du radical verbal des verbes irréguliers et la présence du clitique sujet.
Pour garantir une bonne lisibilité des cartes, lorsque cela s’avère nécessaire, nous scindons l’information en deux et la présentons sur deux cartes, d’une part pour les formes du radical verbal, et d’autre part pour les formes de la désinence et l’emploi des clitiques sujets.
«je prends»: qualité de la voyelle et nature de la consonne finale du radical
[prʒ, prʒ]
[pr(d)z, pr(d)z]
[pr, prɛn]
[prʒ]
[pɛʁn]
information manquante
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Verbes irréguliers: «prendre», 1re personne singulier de l’indicatif présent. (1) Les formes de la base verbale
Pour les neuf heures .. de matin je prends un morceau de fromage .. morceau de saucisse .. bien euh .. un thermos de café ou bien une .. une goutte de vin (rire).
ə prːz də pˈɔrːɛ dɛ tsuː də rːˈaːʋə
Je prends de poireaux de choux de raves.
9.2 IsérablesM:
pɹ ənˈo ɕɔ ɔ tˈæɛ jɔ prˈzɔ n ɛːtʃˈɑːᵊ
Pour (aller) en haut sur le toit je prends une échelle.
10.1 La Chapelle-d’AbondanceF:
pu l katʁ ˈœʁɛ ðə pˈɛʁn na tas də kafˈe
Pour les quatre heures je prends une tasse de café.
10.2 La Chapelle-d’AbondanceM:
-
11.1 LensF:
prˈʒɔ d poʁˈ d tsu - ɛ dɛ ʁˈɑːvɛ
Je prends de poireaux de choux .. et de raves.
11.2 LensM:
pəɹ ɐlˈɐ ʃu ʊ tiᵗ pɹˈʒø ʏn ɛɕjˈɛlɐ
Pour aller sur le toit je prends une échelle.
13.1 LiddesF:
pɔ li nːʋ ˈœʏrə pɹˈːz na tˈasɑ dɛ kɔfˈɪ
Pour les neuf heures je prends une tasse de café.
13.2 LiddesM:
-
14.1 LourtierF:
pʊ ɪ dje ʒ ˈɔːʁ jø pɹʒ mwe də p də fʁømˈɑdz y b də kfitˈyːʁə
Pour les dix heures je prends un morceau de pain de fromage ou bien de confiture.
jʏ pɹɛˈ dœ pɔʁˈː dœ tsʊ ɛ də ʁɑᶹᵋ
Je prends de poireaux de choux et de raves.
14.2 LourtierM:
pɔ ɐlˈa øenˈ ɕᵘ ə tˈɑe j pɹʒ yn etsˈiːɐ
Pour aller en haut sur le toit je prends une échelle.