Carte n° 24014: Synthèse: pronoms et déterminants démonstratifs du féminin singulier    

⇒ Pour les généralités concernant tous les démonstratifs, voir le début du commentaire de la carte n° 24010.

Corpus

La carte n° 24014 synthétise les données utilisées pour l’établissement des cartes n° 24010 et 24012 (pronoms dé­monstratifs féminins de la proximité et de l’éloignement), complétées ici par les attestations disponibles pour les déterminants possessifs féminins dont la morphologie est identique à celle des pronoms dans tous les parlers à l’exception de ceux de la «Louable Contrée» (Lens, Montana) qui distinguent les deux séries (types  [stø] et  [hlø] pour le déterminant,  [sta] et  [hla] pour le pronom; cf. aussi l’historique de [cesti], stì, GPSR 3: 220).

Notre questionnaire comprenait quatre énoncés destinés à susciter l’emploi du déterminant démons­tratif féminin: «Cette semaine, huit brebis ont mis bas» (questionnaire commun), évoquant plutôt une idée de proximité, «Nous étions huit amis pour faire cette farce» (questionnaire commun), évoquant plutôt l’éloignement par l’emploi de l’imparfait, et «Non, je ne me souvenais plus de cette histoire» (questionnaire féminin), évoquant également plutôt l’éloignement. Un dernier énoncé, «Cette année, sur treize veaux, j’ai eu six vachettes et sept taurillons» (questionnaire masculin) a fourni en réalité des réponses pour le masculin (carte n° 24024), «cette année» étant le plus souvent rendu par [stɪ ] ‘cet an’ (ou le synonyme [ɔjˈ]). Quelques réponses spontanées supplémentaires complètent le cor­pus.

Dans une tentative de documenter aussi fidèlement que possible les différents systèmes déictiques (bi- ou tripartites) observables dans les parlers individuels, nous avons légèrement complété nos données par des indications provenant des dictionnaires bilingues et d’études monographiques disponibles pour certains parlers (cf. les notes 1 à 4 du tableau des formes).

Analyse

Les formes de la proximité ( [sti, stʏ, stə], etc. dans la région de Sierre,  [sta] ou [sˈœta] partout ailleurs) sont attestées pour tous les parlers. La situation documentaire est plus problématique pour les formes de l’éloignement. Elle ne nous permet pas de déterminer avec certitude si les parlers pour lesquels nous ne disposons que d’une seule forme pour le 1^er et le 2^e degré d’éloignement réalisent effectivement un système déictique bipartite (comme cela semble être le cas en Vallée d’Aoste et à Évolène, d’après Cerlogne 1907 et Pannatier 1995), ou si une meilleure documentation nous per­mettrait de les classer parmi les parlers à deixis tripartite.

La comparaison des formes de Montana avec celles des parlers immédiatement voisins de Lens et de Miège laisse supposer que dans ce parler, les formes du 1^er degré d’éloignement nous ont simplement échappé au cours de l’enquête. Pour Chalais, l’enquête très incomplète avec l’informatrice féminine n’a probablement pas permis de recueillir la forme du 2^e degré d’éloignement.

En fin de compte, la documentation actuellement à notre disposition permet d’affirmer que les parlers de Fully, Hérémence, Nendaz, Savièse, Sixt, Lens, Miège et St-Jean possèdent effectivement un sys­tème tripartite de pronoms/déterminants démonstratifs féminins morphologiquement distincts. Pour Isérables, Les Marécottes, Liddes, Lourtier, Orsières, Troistorrents, Val-d’Illiez et Vouvry, les infor­mations qui se dégagent d’une comparaison avec la carte n° 24030 permettent en outre de conclure que ces parlers possèdent eux aussi des systèmes déictiques tripartites, mais que la distinction du 1^er et du 2^e degré d’éloignement ne se fait pas par la forme du pronom ou du déterminant démonstratif, mais par les adverbes déictiques. Pour Arbaz, Chamoson, Conthey et La Chapelle-d’Abondance, la question reste ouverte. Pour les conclusions qui se dégagent de l’analyse des formes masculines, voir la carte n° 24024.